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| Les écrits de Callinira | |
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+5marie chevalier Jean-Pierre Poccioni Marija callinira Jipi 9 participants | |
Auteur | Message |
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callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 26/11/2008, 17:58 | |
| Merci, Jipi.
Voici les deux sonnets de Mallarmé à partir desquels je me suis amusée à écrire le mien. Le second est en général connu, le premier, écrit neuf ans plus tôt, en général l'est moins :
La Nuit approbatrice allume les onyx De ses ongles au pur Crime, lampadophore, Du Soir aboli par le vespéral Phoenix De qui la cendre n'a de cinéraire amphore
Sur des consoles, en le noir Salon : nul ptyx, Insolite vaisseau d'inanité sonore, Car le Maître est allé puiser de l'eau du Styx Avec tous ses objets dont le Rêve s'honore.
Et selon la croisée au Nord vacante, un or Néfaste incite pour son beau cadre une rixe Faite d'un dieu que croit emporter une nixe
En l'obscurcissement de la glace, décor De l'absence, sinon que sur la glace encor De scintillations le septuor se fixe.
Ses purs ongles très haut dédiant leur onyx, L'Angoisse ce minuit, soutient, lampadophore, Maint rêve vespéral brûlé par le Phénix Que ne recueille pas de cinéraire amphore
Sur les crédences, au salon vide : nul ptyx, Aboli bibelot d'inanité sonore, (Car le Maître est allé puiser des pleurs au Styx Avec ce seul objet dont le Néant s'honore.)
Mais proche la croisée au nord vacante, un or Agonise selon peut-être le décor Des licornes ruant du feu contre une nixe,
Elle, défunte nue en le miroir, encor Que, dans l'oubli fermé par le cadre, se fixe De scintillations sitôt le septuor.
Bonne soirée.
Callinira | |
| | | callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 26/11/2008, 18:03 | |
| Lire : "Le second est connu". | |
| | | callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 18/7/2011, 09:50 | |
| Crépuscule
Guêpe annelée, dard blond, le mielleux été va son temps. Heure sucrée qui colle au souvenir... Dans la pierre bleutée un étrange rai-de-cœur. Mouvante, sur le toit, l'ombre du tourne-vent.
Les fils se sont croisés au troublant canevas des vies, mais savions-nous qu'il nous faudrait pâtir ? Triste enfant de demain, je sais ton crève-cœur, je ne puis soutenir ton regard émouvant.
Bribes d'été. Le vent couche la pelouse où le jouet cassé gît, la corde s'use. Les oiseaux dans le soir bientôt tairont leur chant.
Une main s'est ouverte et laisse aller le livre qui glisse et choit au sol. Sacré, comme un plain-chant, quelque mot murmuré peine à franchir la lèvre.
2009 | |
| | | Jean-Pierre Poccioni Membre
Nombre de messages : 3237 Age : 76 Localisation : Loiret Date d'inscription : 10/12/2005
| Sujet: Les écrits de Callinira 18/7/2011, 10:29 | |
| Comme il est singulier, presque archéologique, de rapprocher comme vous le faites des formes différentes, l'une, celle du sonnet, sempiternelle ( j'en avais contesté la pertinence un temps, mais l'heure n'est pas à ces considérations) et l'autre, en creux, liberté prise.
Ce qui me touche avant tout, c'est la musique aussi présente dans un cas que dans l'autre, une harmonie tellement savante qu'elle semble totalement naturelle. Mais de ce naturel qui est tout sauf de l'ordre de la nature, un naturel artistique, si j'ose !
J'aime aussi la finesse infinie de l'expression d'une mélancolie fondamentale, ontologique. Elle me confirme, pour autant qu'on puisse s'avancer sur si peu de texte ( mais avec quelle densité!) que vous serez touchée par Cristina Campo (quand vous aurez enfin trouvé son livre).
Que dire d'autre si ce n'est que ce Crépuscule ne me fait songer à aucun autre poète, n'attise aucune référence, et donc ne ressemble qu'à ce qu'on doit nommer, vous.
Comme il serait bon que de telle perles luisent plus souvent dans les eaux souvent troubles d'Internet.
Mais après tout...la rareté, n'est-ce pas... | |
| | | callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 19/7/2011, 12:57 | |
| Je vous remercie pour votre lecture.
Je suis heureuse que vous ayez trouvé dans ce texte ce que j'avais à coeur d'y mettre.
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| | | François Administrateur
Nombre de messages : 2406 Age : 62 Localisation : Belgique Date d'inscription : 27/06/2007
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 19/7/2011, 13:43 | |
| - Jean-Pierre Poccioni a écrit:
- Ce qui me touche avant tout, c'est la musique aussi présente dans un cas que dans l'autre, une harmonie tellement savante qu'elle semble totalement naturelle. Mais de ce naturel qui est tout sauf de l'ordre de la nature, un naturel artistique, si j'ose !
J'aime aussi la finesse infinie de l'expression d'une mélancolie fondamentale, ontologique. Je ne pourrais mieux dire. Jean-Pierre Poccioni a trouvé les mots justes pour décrire une expérience de lecture que nous avons apparemment partagée. Votre écriture est très belle, c'est un plaisir de lire un texte de ce niveau. | |
| | | callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 21/7/2011, 13:22 | |
| Merci, John, de vous être intéressé à ce texte.
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| | | callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 4/9/2011, 14:08 | |
| Fuite
Ô souvenirs bannis d’une banale enfance, monde muré, mes mains glissent sur vos cloisons.
Nous n’étions pas heureux, mais que me soient rendues quelques clefs, que me soit dévouée comme ultime cadeau l’essence même de ce temps, notre jardin perdu. Nouveaux, nous allions nus parmi les fleurs et le ciel parfumé enveloppait de bleu nos membres neufs.
Nous n’étions pas heureux, mais qu’on me rende la mélancolie première, pure, si douce au cœur, et la couleur aussi des soirs qui l’enlaçaient, l’odeur grise des trottoirs tièdes encore des lourds après-midi, les bornes de la rue qu’étoilait le mica. Une fois encore, le vent de nos courses et le silence de nos désirs, est-ce trop dire ?
Nous n’étions pas heureux, mais que je goûte encore ce que le corps veut oublier, l’infini plaisir de la détresse, l’amoureuse chaleur des larmes, l’indicible saveur du malheur… Nous disions au temps immobile « file, fuis, franchis pour nous quelques coudées, vite, va… »
Et il allait.
Mai-juin 2010
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 4/9/2011, 14:21 | |
| Tout simplement beau ! Ce qui m'a le plus touché : - callinira a écrit:
- mais que je goûte encore ce que le corps veut oublier
Merci callinira. |
| | | Jean-Pierre Poccioni Membre
Nombre de messages : 3237 Age : 76 Localisation : Loiret Date d'inscription : 10/12/2005
| Sujet: Les écrits de Callinira 4/9/2011, 14:35 | |
| Un très joli texte qui fait, pour moi, écho au merveilleux roman d'Ana Maria Matute : Paradis inhabités que Callinira devrait adorer si elle ne l'a pas encore lu.
Note : l'emploi de "dévouée" m'a intrigué et je ne me suis pas répondu... | |
| | | Marilou Membre
Nombre de messages : 425 Age : 35 Localisation : Nantes-Lyon Date d'inscription : 14/05/2011
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 4/9/2011, 14:41 | |
| Un texte très émouvant. J'ai été subjuguée par le rythme du poème et son jeu de sonorités. | |
| | | François Administrateur
Nombre de messages : 2406 Age : 62 Localisation : Belgique Date d'inscription : 27/06/2007
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 4/9/2011, 15:07 | |
| Superbe. _________________ "Je n'ai pas d'obligation plus pressante que celle d'être passionnément curieux". (Albert Einstein)
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| | | Jipi Administrateur
Nombre de messages : 5908 Localisation : Belgique Date d'inscription : 26/10/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 4/9/2011, 15:25 | |
| Tout d'abord Callinira je suis très heureux de voir que ce sujet avec vos écrits soit remonté. Comme le temps passe... je me souviens de votre roman ! Passion des Mots commence à avoir un goût de bonnes choses derrière les fagots ! Il a presque six ans et cela ne nous rajeunit pas !
Venons-en à votre texte...
Il est d'abord marqué par un très beau rythme... Je me surprends d'ailleurs à le lire à voix haute devant mon écran. Le style anaphorique du texte n'est pas étranger à ce rythme un peu lancinant qui le traverse, comme si le narrateur cherchait à se rappeler les choses avec difficulté même si ces dernières semblent encore vivaces, du moins sous certains angles.
Ce texte, marqué par une ambivalence thématique qui me plait (la douleur et le rappel de certains instants heureux), offre par ailleurs un doute qui me convient également. Texte à la fois mystérieux et d'une grande lucidité dans le rappel du passé.
Texte charnel traversé par les cinq sens de notre mémoire.
Un langage à la simplicité étrange, lumineuse, éminemment poétique.
Beau. | |
| | | callinira Membre
Nombre de messages : 265 Date d'inscription : 09/12/2005
| Sujet: Re: Les écrits de Callinira 5/9/2011, 18:23 | |
| Je vous remercie tous pour votre lecture et vos commentaires.
Le rythme, en poésie comme en prose, est pour moi une recherche essentielle. Je me réjouis donc de ne pas avoir échoué sur ce point.
Je n'ai pas lu Paradis inhabités, mais je vais le faire.
Quant à "dévouée", le mot ajoute à "offert" (son synonyme ici) une coloration religieuse. J'ai hésité à l'employer au passif, mais comme dans cette acception le verbe est transitif...
Merci encore. | |
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